Dr Kin
Une peinture d'un homme à côté d'un étang.

Et si nous faisions plus de tort que de bien?

L’avènement des médias sociaux permet à un grand nombre d’individus de véhiculer une grande quantité d’information avec une aise parfois déconcertante. L’univers de l’entraînement et de la nutrition n’y fait pas exception. Il n’y a pas une journée où mon regard ne croise une série de statuts ou de Tweets traitant de ces sujets. Initialement, je m’amusais à les lire et parfois même je me permettais de commenter. Habituellement, j’obtenais une réponse plutôt agressive à mes propos, comme si l’auteur s’insurgeait que quelqu’un puisse argumenter contre un simple Tweet ou statut Facebook. Je dois l’avouer, parfois je ne me gênais pas pour démolir sans retenue, parfois j’y allais plus en douceur en espérant sincèrement obtenir plus d’information afin d’enrichir mes connaissances. Pour moi, il n’y avait pas de problème, tout ça ne faisant partie que de l’univers des réseaux sociaux.

C’est là que j’avais tout faux…

En réalité, les réseaux sociaux sont devenus une source d’information pour bon nombre d’internautes. Pour plusieurs, les Tweets et statuts sont une mer d’information où il fait bon naviguer. Cette abondance d’information, pas toujours valide ou légitime, devient progressivement source de bien des problèmes potentiels. Si, à l’origine, je m’attendais à ce que les mythes, faussetés et arnaques du conditionnement physique et de la nutrition allaient lentement être démasqués, je dois admettre qu’il se produit un effet contraire. La mer ne devient pas un paradis limpide et cristallin, elle se métamorphose en dépotoir immonde. Au lieu de s’épurer, elle s’autopollue.

On y retrouve de plus en plus de gens cherchant la reconnaissance à tout prix et prêts à tout et n’importe quoi pour l’obtenir. Ces gens vont volontairement véhiculer des informations douteuses, erronées et mensongères afin de nourrir leur ego et remplir leur portefeuille. Comme il n’existe aucun chien de garde, ces individus peuvent transmettre leurs fausses informations comme une gastro dans une garderie clandestine.

On y retrouve également des pollueurs honnêtes. Des gens qui pensent bien faire, qui veulent aider leur prochain en saisissant la tribune que leur procurent les réseaux sociaux. Malheureusement, ces gens véhiculent plus souvent des croyances en activité physique et en nutrition que des éléments valides et crédibles. L’intention est louable, le geste est néanmoins problématique.

Finalement, il y a ceux qui ont trouvé un moyen d’obtenir de l’attention, une forme d’amour prenant naissance dans le nombre de fans ou d’abonnés. Il leur faut donner des informations qui leur donneront de l’amour, des fans et des abonnés. Peu importe ce que je dis, pour autant qu’on m’aime.

Le monde du Fitness est en pleine effervescence et d’autant que je me souvienne, je n’ai jamais vu un tel engouement pour cette discipline. De plus en plus d’athlètes et d’entraîneurs utilisent les réseaux sociaux pour partager des informations sur leur nutrition et sur leur entraînement. Si en apparence il s’agit d’un geste anodin, à la limite exhibitionniste, les conséquences peuvent être fâcheuses pour plusieurs. Et si ce que je fais était mauvais pour moi, mais que je ne m’en rendais pas compte? Qu’arrive-t-il de mes Tweets et statuts qui peuvent induire tous ceux et celles qui les lisent assidûment également en erreur? Ce n’est pas parce que l’on fait la diète X et l’entraînement Y et que l’on présente des abdominaux découpés aux ciseaux qu’il s’agit forcément d’une stratégie efficace. Et si la diète X et l’entraînement Y ne fonctionnaient qu’avec un soupçon de produits dopants? Et si la diète X et l’entraînement Y nous poussaient lentement vers une distorsion sévère de notre image corporelle et des troubles graves de comportements alimentaires? Et si on avait tort? On fait quoi pour se rattraper? On publie un Tweet mentionnant que nous sommes désolés et qu’il ne fallait pas faire ça? Personne ne le lira…

Oui, on me ramènera la liberté d’expression sous le nez… Mais, je ne parle pas ici d’aspect légal, je souhaite amener le débat sur le terrain de la conscience sociale. Qu’est-ce qui nous permet de lancer des recommandations nutritionnelles et des programmes d’entraînement à tous les vents, le tout juxtaposé à des photos de nous en maillot pour appuyer nos propos? Des médecins ne peuvent poser de diagnostics via Twitter ou Facebook, des ingénieurs ne peuvent pas signer des plans sur MySpace… Pourtant, vous et moi pouvons librement dire à nos fans et abonnés de manger de l’arsenic et de boire de l’antigel.

Et si on faisait plus de tort que de bien?

Voici quelques règles que je tente d’appliquer (bien humblement) lorsque je diffuse de l’information, en espérant que cela puisse vous être utile lorsque vous publiez à votre tour.

— Est-ce que cette information peut causer du mal?

Quels peuvent être les conséquences néfastes découpant de la publication de cette information?

— Qui peut lire cette information?

Est-ce que l’information diffusée pourrait être lue par des personnes qui pourraient en être affectées négativement?

— Est-ce que cette information peut être intéressante?

Le contenu du message peut-il être d’une utilité quelconque à quelqu’un?

— Est-ce que cette information est motivée par une réalité mesurable ou bien est-elle basée sur mes croyances?

Est-ce que je souhaite émettre une opinion ou bien informer objectivement les lecteurs? Est-ce clair qu’il s’agit d’une opinion si c’est le cas?

 — Est-ce que cette information sert uniquement à me mettre en valeur ou bien met-elle de l’avant un contenu pertinent?

Si oui, est-ce clair qu’il s’agit d’une publicité ou d’un assouvissement narcissique visant à nourrir mon égo?

Pour moi, il s’agit d’un processus qui me permet de prendre un certain recul fasse aux informations que je souhaite transmettre. Pourquoi faire ce genre de démarche? Non pas pour limiter la transmission d’information et retreindre vos Tweets, mais plutôt parce qu’il n’y a rien de pire que d’apprendre que l’on a fait du mal à des gens que l’on souhaitait aider.