Dr Kin

La vie à l’école : Grasse matinée, grasse personne?

À la suite de tout le battage médiatique engendré par les modifications apportées aux recommandations en activité physique (quoi? Les médias en ont parlé pendant au moins 1 journée et demie ce qui est énorme pour la nature du sujet), j’ai eu l’occasion d’assister à plusieurs discussions animées tournant autour de l’activité physique. Tout juste au moment où les discussions commençaient à tourner en rond, le sujet a légèrement dévié pour se centrer sur l’activité physique des enfants et leurs cours d’éducation physique. J’avais en face de moi deux couples de jeunes parents qui étaient furieux de voir que les jeunes n’avaient plus d’occasion de pratiquer des activités physiques et qui s’inquiétaient de l’avenir qui était réservé à leur progéniture. Il n’en fallait pas plus pour que je ressorte une sympathique petite étude que j’avais menée il n’y a pas si longtemps que ça…

Étant, à la base un enseignant en activité physique, je me sens toujours interpellé lorsque l’on parle d’activité physique à l’école et surtout lorsque l’on y associe le terme ÉDUCATION. Moi, aussi, je m’étais jadis interrogé sur l’impact des cours d’éducation physique, mais, plus particulièrement de la répartition du temps d’activité physique chez les enfants d’âge primaire. À l’origine, je m’inquiétais de la diminution du nombre d’heures allouées au cours d’activité physique (davantage pour le nombre d’heure d’enseignement et de travail qui lui étaient associées, mais, comme je n’enseigne plus, mon intérêt s’est par la suite porté sur les enfants) et l’impact sur le quotidien des enfants. Plus particulièrement, je me suis intéressé à la répartition du temps d’activité physique sur la semaine de 7 jours. Bref, où et quand les enfants bougent le plus et où et quand bougent-ils moins?

Les détails du projet de recherche sont décrits dans un rapport disponible sur le site Internet de ma compagnie. En résumé, nous avons mesuré minute par minute la dépense énergétique d’enfants d’âge primaire pendant une période minimale de 7 jours. Quelle ne fut pas ma surprise de constater que les enfants bougent davantage à l’école (448 min par jour en moyenne) qu’à la maison (360 min par jour en moyenne)! Revenons à nos couples de jeunes parents bouillant de rage contre le Ministère de l’Éducation du Québec et verbalisant leur indignation telle Gilles Proulx dans ses belles années.

Si les enfants bougent beaucoup à l’école et qu’ils bougent significativement moins la fin de semaine, doit-on blâmer l’école? Je vous dirais qu’il est tenant de blâmer les pôvres parents et de leur tomber dessus à bras raccourcis, mais, pour une fois, je vais tenter de couper la poire en deux (question de m’aliéner l’école et les parents…).

Oui, je pense que les parents ont un rôle important à jouer dans le niveau d’activité physique de leurs enfants. Insuffler un mode de vie actif à ses enfants n’implique pas uniquement d’allez au parc avec eux (et de s’asseoir sur le banc en lisant le journal), mais bien de les éduquer à jouer et à bouger (ça, ça veut dire que vous allez vous salir en allant jouer au parc). Il ne s’agit pas de se contenter d’aller reconduire ses enfants à l’aréna, mais bien de s’intéresser aux activités physiques pratiquées et surtout, surtout d’y associer le sentiment de plaisir qui doit venir avec la pratique d’une activité physique. Oui, je sais que de se lever à 5 h le matin pour aller reconduire le petit dernier à sa pratique du samedi matin ne semble pas agréable, mais, en maugréant tout au long du trajet, on contribue à développer un sentiment négatif quant à la pratique d’activités physiques. Là, vous voyez potentiellement où je veux en venir, sinon relisez le titre…

La principale cause de la baisse du niveau d’activité physique la fin de semaine se situe fort probablement au niveau du temps allongé (9.3 h par jour la semaine, 10 h la fin de semaine. Voilà, la grasse matinée à tourner dans les couvertures afin d’atteindre le toujours trop loin bouton snooze peut affecter le tour de taille. Bien évidemment, il ne s’agit pas d’un facteur unique, mais il s’agit souvent d’une heure passée allongée qui pourrait être mise à profit. L’argumentation de mes deux couples commençait à être dangereusement ébranlée.

J’aurais pu me contenter de blâmer les parents indignes qui s’enivraient de plaisir somnolent lorsque leurs enfants ne se réveillaient pas trop tôt la fin de semaine pour abruptement mettre fin à leur relation soporifique avec Morphée. La tentation est forte, mais, je vais plutôt diviser le blâme et me tourner vers les cours d’éducation physique dispensés à l’école.

Lorsque j’étais plus activement impliqué dans le milieu scolaire, la tendance des cours d’éducation physique était de tenter par tous les moyens possibles et imaginaires de faire bouger les élèves. Sommairement, personne ne reste assis et on bouge et gare à ceux et celles qui restent assis ou qui oublient leurs vêtements de sport… Dans cette quête vers un niveau optimal de temps actif d’activité physique, peu de temps était alloué à l’éducation. Oui, je sais très bien qu’on nous a expliqué en long et en large tous les règlements de chaque sport (habituellement, badminton, basketball, volleyball et athlétisme), mais on ne nous a pas expliqué ce qu’était l’activité physique et surtout, comment maintenir ou augmenter notre niveau d’activité physique au quotidien. L’accent était mis sur les activités physiques volontaires de nature sportive et praticable à l’école. Mais que faire à la maison? Bâtissez-vous un terrain de basket dans votre sous-sol pour les froids mois d’hiver…

Faisons une analogie avec les autres matières. Comme parents, si vos connaissances en géographie sont limitées, vous pouvez tout de même contribuer aux devoirs et leçons de vos enfants à l’aide du cahier d’étude. Vous n’avez donc pas besoin de connaître les grandes rivières du Québec, vous pouvez vous référer au petit document tout froissé qui sort du sac d’école. L’école aide les parents en leur fournissant des outils pour éduquer leurs enfants pour des matières spécifiques. Qu’en est-il de l’activité physique? Pas de cahier d’étude destiné aux parents parce que, tout le monde le sait, l’activité physique tout le monde connait ça. Comme la géographie et l’histoire…

Encore une fois, je pense que nous démontrons un esprit beaucoup trop réducteur face à l’activité physique et que l’atteinte d’un niveau d’activité physique plus important pour la population passe par une synergie pédagogique impliquant une éducation de l’enfant et un soutien aux parents.

Ce billet a été rédigé debout afin de diminuer le temps sédentaire de l’auteur.