Dr Kin
nutritionniste

Les 4 pièges à éviter avec votre nutritionniste

Depuis 2004, le nombre de nutritionnistes dans les centres de conditionnement physique a augmenté de façon quasi exponentielle. Initialement, les nutritionnistes ne se pressaient pas aux portes des gyms pour offrir leur service. Je me souviens encore avoir eu de longues discussions avec la responsable des stages du département de nutrition de l’Université de Montréal afin d’offrir les centres de conditionnement physique comme milieu de stage. L’idée était bonne, les candidates étaient plutôt rares. Encore aujourd’hui, l’adaptation du travail d’une nutritionniste (désolé messieurs dtp vous êtes trop peu nombreux pour que j’utilise le masculin) n’est pas toujours facile. Comme dans toute profession, il y en a des excellentes et malheureusement des moins bonnes (ça, c’est la loi de la normale…). Voici, bien humblement, mes recommandations pour le consommateur de services nutritionnels dans un contexte de conditionnement physique.

Se fier à sa formation universitaire et à son expérience

Comme pour les entraîneurs, la formation et l’expérience peuvent s’avérer des atouts intéressants, mais on oublie souvent qu’il s’agit d’une lame à deux tranchants. Tout dépend comment la professionnelle de la nutrition utilise son bagage académique et son expérience. Alors que les bases en nutrition se doivent d’être solides, il est possible que les notions de nutrition sportive des nutritionnistes le soient un peu moins. Pourquoi? Parce que la formation académique ne comporte que peu de contenu relatif à la physiologie de l’exercice et aux relations entre la performance et la nutrition (à l’époque de ma maîtrise, on comptait moins de 15 h allouées à ce chapitre de la nutrition) ce qui fait des nutritionnistes des professionnelles généralistes de la nutrition. Bien sûr, les nutritionnistes ne sont pas dépourvues de connaissances en matière de nutrition sportive, mais l’ampleur des connaissances devant être acquises à l’intérieur de leur formation ne laisse que bien peu de place à ce volet de la nutrition. Il importe donc à chacune d’elle (et eux aussi) de poursuivre leur formation de leur propre chef. Comme il existe bien peu de formation continue en nutrition sportive, les nutritionnistes sont malheureusement forcées de se frayer seules un chemin dans cet univers parfois nébuleux. Et quand on avance seul, on peut courir le risque de s’égarer.

À retenir : La théorie et la pratique dépendent de la compréhension que l’on peut en tirer.

Se fier à son apparence

Ce n’est pas parce que votre nutritionniste est grande que ses plans nutritionnels feront de vous un pro du basketball. Comme dans toute profession, notre première impression tend à dicter notre perception de la compétence d’un individu. Une nutritionniste obèse n’inspire pas confiance. Cependant, ce ne sont pas les choix personnels de votre nutritionniste qui importent, mais plutôt les choix qu’elle peut vous faire faire. Somme toute, vous la payez pour ce qu’elle sera en mesure de vous faire faire plutôt que ce qu’elle fait pour elle-même. L’inverse est aussi vrai, le corps athlétique d’une nutritionniste n’est pas gage de compétence, mais plutôt d’un rythme de vie personnel qui n’est pas nécessairement transmis en consultation. Personnellement, ma nutritionniste peut être cul-de-jatte, aveugle, obèse et diabétique de type 2, ce qui m’intéresse c’est ce qu’elle peut m’apporter.

À retenir : Ne regardez pas, écoutez et comprenez.

Se fier à ses calculs

Les calculs de bioénergétiques peuvent parfois être mathématiquement simples, mais ils sont toujours biologiquement complexes. Par exemple, il est facile de maîtriser l’utilisation d’équations pour déterminer le métabolisme de repos, il l’est beaucoup moins de maîtriser les relations physiologiques qui les sous-tendent. À ma grande surprise, il m’est arrivé de rencontrer des nutritionnistes (de rares nutritionnistes, bien sûr) qui ne connaissaient pas l’origine et le pedigree d’une équation qu’elles utilisaient pour déterminer le métabolisme de repos. Il devient difficile de déterminer la précision et la validité d’une équation pour un client sans en connaître l’origine et les limites. Lorsque l’on tente de déterminer les besoins quotidiens en énergie, cette erreur peut s’avérer coûteuse. Par exemple, si la précision d’une équation pour le métabolisme de repos est de ±100 kcal par jour et que nous appliquons un facteur d’activité physique pour obtenir les calories totales dépensées sur une journée, nous multiplions également l’erreur. Trop tôt pour des mathématiques? Bien sûr que non… Supposons que notre calcul du métabolisme de repos nous donne 1200 kcal par jour, que notre équation est associée à une marge d’erreur de ±100 et que nous estimons le niveau d’activité physique comme étant sédentaire (x 1.41.6). Pour obtenir les calories totales d’une journée, nous multiplions 1200 par 1.4 ou 1.6 pour obtenir 1680 kcal par jour (j’ai pris 1.4 comme facteur d’activité physique). Il faut également multiplier notre marge d’erreur, donc 100 par 1.4 pour obtenir 140 kcal par jour. La dépense énergétique estimée sera, dans le meilleur des mondes, de 1680 ± 140 kcal (ici, je mets de côté volontairement l’autre marge d’erreur associée à la détermination arbitraire du niveau d’activité physique). Bref, ce n’est pas parce que l’on utilise des équations que nous sommes précis (même si nous mettons quatre chiffres après la virgule…).

À retenir : En nutrition comme en entraînement, les calculs mathématiques sont alléchants, mais bien souvent animés d’une précision illusoire. Il faut donc les comprendre pour bien les utiliser.

Ne pas remettre en question son travail

Il s’agit de l’élément le plus important. Le travail d’une nutritionniste n’est pas chose facile et ces professionnelles de la nutrition doivent composer avec une quantité astronomique de variables. Il devient dès lors pratiquement impossible d’avoir tout juste du premier coup. L’erreur doit être permise et surtout, comprise. Le processus d’intervention en nutrition doit donc comprendre une structure favorisant la compréhension de l’intervention plutôt que le suivi aveugle de règles figées dans une théorie parfois aride. Il faut que le client et la nutritionniste soient prêts à vivre avec l’erreur, la comprendre et corriger le tir. Le client ne peut donc s’attendre à une recette de pâté chinois miracle, mais à un livre d’ingrédients qui doivent être organisés en une recette personnalisée. Ca, c’est un long processus.

À retenir : Votre nutritionniste doit faire preuve d’humilité et elle doit vous informer du processus d’essai-erreur.