Dr Kin
IMC, indice de masse corporelle, poids santé

L’ABC de l’IMC (Indice de Masse Corporelle et Poids santé)

J’entends régulièrement des critiques sévères envers l’indice de masse corporelle et son utilisation pour déterminer le poids santé.
L’indice de masse corporelle (IMC) est probablement la mesure la plus utilisée qui nous permet de déterminer le poids « santé ». Ce fameux poids santé, le poids « normal », bref, le critère qui fait mal et qu’on déteste (et le seul critère reconnu pour catégoriser l’obésité). L’IMC est une mesure couramment employée tant dans le domaine médical que dans le milieu du conditionnement physique. Comme dans presque la totalité des mesures de composition corporelle, l’IMC est trop souvent utilisé à tord et à travers, ce qui ferait probablement sourciller de désarroi son inventeur, le Belge Lambert Adolphe Jacques Quételet (L’IMC se nommait Indice de Quételet à l’origine dans les années 1800). L’IMC est tout simplement une mesure de proportion qui prend en considération le poids total et la stature élevée au carré (donc; poids (kg)/stature (m) au carré). On rapporte que les valeurs les plus sécuritaires pour la santé tant chez les hommes que chez les femmes se situent entre 18.5 kg/m² et 24.9 kg/m². Des valeurs inférieures ou supérieures sont associées à des risques accrus de complications reliées à la composition corporelle (sarcopénie, ostéoporose, diabète de type 2, hypertension, etc.). Il s’agit d’une simple association mathématique entre des valeurs d’IMC et l’observation de l’incidence de complications pour la santé. Oui, oui, je vous entends et je vous vois lever frénétiquement l’index de la main pour me dire que deux individus peuvent avoir le même IMC, mais être totalement différent en matière de composition corporelle. Prenons une valeur d’IMC, disons 33 kg/m. Le cas le plus fréquent d’IMC à 33 kg/m² est une personne souffrant d’obésité, c’est-à-dire d’une personne présentant une accumulation « pathologique » de gras. Cette personne est à risque de développer du diabète de type 2, de l’hypertension, des dyslipidémies et tout un tas de trucs trop longs à mentionner, mais, qui ne font définitivement pas de bien. Cependant, nous pouvons également avoir un culturiste, champion poids lourd, qui présente un IMC de 33 kg/m². Ce dernier n’a pratiquement pas de gras, mais, une masse musculaire définitivement imposante (dommage, je suis à court de photos de moi sur la plage…). Nous avons alors deux individus complètement différents, mais avec le même IMC. Je vais m’avancer un peu ici, mais, statistiquement, ces deux personnes ont moins de chance d’atteindre l’espérance de vie de l’espèce humaine, mais ils ne mourront pas obligatoirement de la même chose et les causes seront fort probablement différentes. Vous en avez vu beaucoup des culturistes de haut niveau qui se rendent à 80 ans? Oui, oui, il y en a, comme il y a des personnes obèses qui profitent de leur carte d’âge d’or, mais, dans l’ensemble, ce n’est pas statistiquement probant. Donc, si vous voulez vivre vieux, vous avez plus de chance d’y arriver si votre IMC est entre 18.5 et 24.9 kg/m². Plus de chance, pas une garantie prolongée…
Je dois cependant reconnaître certaines faiblesses à l’IMC, entre autres son incapacité à déceler certaines problématiques associées à une composition corporelle inadéquate. Par exemple, reprenons nos deux individus qui, supposons-le, ont participé à une émission de téléréalité et ont vu leur poids réduire tel un morceau de beurre dans un spa bondé de speedos léopards. Disons que les deux ont désormais un IMC de 23 kg/m². La vie est belle, ils ont un statut de célébrité et leur poids leur permet d’espérer vivre vieux et en santé. Peut-être pas. Si un de nos deux comparses à perdu beaucoup, beaucoup de muscle et pas tant que ça de gras, il est possible que le poids soit rendu « normal », mais qu’il y ait encore trop de gras et maintenant, plus assez de muscle. Même si nous ajoutions une mesure de circonférence de la taille pour tenter de compenser pour les lacunes de l’IMC, il demeure possible que bon nombre de personnes passe entre les mailles du filet avec une valeur trop importante de gras et pire que tout, une quantité insuffisante de muscle. Cette dernière carence risque de s’accentuer avec le vieillissement et diminuer les capacités fonctionnelles. Ça fait pas des p’tits vieux fringants ça…
Avant que ceux et celles qui avaient l’index pointé vers le ciel précédemment ne développent une tendinite, je vais parler du pourcentage de gras. Rassuré? Vous devriez plutôt vous inquiéter…
Le pourcentage de gras ne représente pas, contrairement à ce que plusieurs pensent, la quantité de gras d’un individu. Il s’agit plutôt de la fraction du poids total qui est formée par le gras. La différence? Importante! Allons-y d’un exemple pratique impliquant des mathématiques (s.v.p., ne saignez pas du nez). À ma clinique, j’ai deux jeunes femmes qui présentent des pourcentages de gras similaires l’une est à 28 % et l’autre à 33 %. Tout de suite, les habitués pseudo spécialistes du pourcentage de gras ont déposé leur adipomètre (les pinces à petit mou) et se sont dit : voilà deux femmes rondes et trop grasses. Eh bien non. L’une souffre d’anorexie (28 %) et l’autre d’obésité (33 %). La première n’a pas beaucoup de gras, vraiment pas beaucoup. Cependant, elle manque encore plus de masse musculaire ce qui fait qu’elle ne pèse presque rien (41 kg). Mais, sa masse grasse (12 kg), normale représente une fraction importante de son poids total (28 %). Alors que plusieurs seraient tentés de lui dire de maigrir davantage ou de se poser des questions sur leur appareil de mesure, je me contenterais de lui dire de prendre du muscle et du poids. Pour notre deuxième exemple, si elle présente une masse grasse trop importante (33 kg), elle présente également une imposante masse musculaire (40 kg de muscle, 27 kg d’organes : c’est plus que moi!!), et ce, sans s’entraîner. Dans son cas, il faudrait penser à réduire sa masse grasse de façon importante et à profiter un peu de cette masse musculaire. Donc, deux valeurs presque identiques de pourcentage de gras, mais deux cas diamétralement opposés. Voilà pourquoi je n’utilise pas le pourcentage de gras.

Mais quoi faire? Quel outil utiliser? Un outil qui combine les mesures de composition corporelle (masse grasse, masse maigre) et le principe de l’IMC. On utilise l’indice de masse grasse (IMG) et l’indice de masse maigre (IMM)[1]. Ces mesures permettent d’identifier des valeurs cibles pour la quantité de gras et la quantité de masse maigre (muscle, organes, os) en fonction de la grandeur. L’article en référence fournit ces valeurs et permet plus aisément de fournir des objectifs de changement pour obtenir un poids et une composition corporelle adéquate.
Alors, si vous utilisiez le pourcentage de gras comme mesure de référence, vous avez compris qu’il était impossible de fournir des critères santé à partir de cet outil. Certains disaient qu’à partir de 30 % de gras, on était obèse. Ben non, tough luck comme y disent, ce n’est pas comme ça que ça marche! Alors, s.v.p., mettez-vous à jour et cessez d’utiliser comme valeur finale de mesure de la composition corporelle le damné pourcentage de gras : vous êtes seulement à quelques opérations mathématiques de faire quelque chose de très bien. Simplement, vous n’avez qu’à multiplier le pourcentage de gras par le poids et vous obtenez la quantité de gras. Vous la soustrayez du poids total et vous obtenez la masse maigre. Vous divisez chacune de ces valeurs par la grandeur (m) élevée au carré. Référez-vous à l’article pour les valeurs cibles (allez, un peu d’effort!!!).

Références

1. Bigaard, J, K Frederiksen, A Tjonneland, et al., Body fat and fat-free mass and all-cause mortality. Obes Res, 2004. 12(7): p. 1042-9.