Dr Kin
Noir, blanc, spirale.

Terminons avec les terminologies de l’entraînement

 

Je me remets à peine de ma nuit blanche passée au 24 h Roller Montréal (en fait, 21 h, car les intempéries ont finalement eu raison des organisateurs) alors, je me permets un léger billet plus philosophique que pratique (ça commence mal vous me direz…). Avant de commencer, je me dois de souligner les efforts de mes 8 coéquipiers qui ont su rendre cette 4e expérience des plus agréable malgré la pluie qui nous a chaleureusement accompagné pendant la majeure partie de notre périple sur le Circuit Gilles Villeneuve au profit de la lutte contre la sclérose en plaque et pour la promotion de l’activité physique. De l’aquaplanage en patins à roues alignés, c’est possible, je vous le confirme. Fin de la parenthèse.

Dans le merveilleux monde de l’entraînement, il y a certains concepts qui m’agacent dont un tout particulièrement inoffensif, mais ô combien agaçant à mes oreilles. La terminologie des actions musculaires. Je crois qu’il s’agit de l’une des premières choses qu’un entraîneur apprend avec fierté : lorsque le muscle se raccourcit, concentrique, lorsqu’il s’allonger, excentrique et lorsqu’il demeure de même longueur, isométrique. Enfin, des termes scientifiques associés à l’entraînement! De quoi donner fière allure à n’importe quel jeune débutant. J’entends régulièrement des entraîneurs parler de leur entraînement mettant l’emphase sur la partie excentrique de tel ou tel mouvement et je lis même assez fréquemment dans des publications scientifiques les fameux termes concentrique, excentrique et isométrique. Alors, pourquoi écrire un billet là-dessus et surtout, pourquoi être agacé par cette terminologie?

Simplement parce qu’elle est fausse. Quoi? Ce qui nous a été enseigné à l’université n’est pas issu d’une source intarissable de vérité? Faut croire que non…

Si certains vont me traiter encore une fois de puriste, je vais me permettre de poursuivre et de vous expliquer pourquoi. Si je pose la question : « Que veut dire isométrique? », plusieurs d’entre vous vont s’empresser de répondre fièrement : « iso; même, métrique; longueur ». Il s’agit d’une action musculaire qui ne génère pas de mouvement externe. Et je répondrai bravo. Si je pose la question : « Que veux dire concentrique? », plusieurs vont me répondre qu’il s’agit de la phase où le muscle se raccourci. Et si je pose la question : « Que veux dire excentrique? », on me dira qu’il s’agit de la phase où le muscle s’allonge ou bien du qualificatif poli pour décrire ma voisine. Et je répondrai bravo pour la voisine, mais pour les deux autres, ça ne colle pas.

La définition de concentrique va comme suit : « Qui a un même centre, en parlant de cercles et de courbes ». Celle d’excentrique : « Didactique : Dont le s’entre s’écarte d’un point donné. Mathématiques : Qui n’a pas le même centre? Astrologie : Qui s’éloigne du centre? Militaire : Qualifie un mouvement qui éloigne une armée, un corps d’armée du centre de ses opérations. Figuré : Qui agit contrairement aux habitudes reçues. » . Si les termes concentrique et excentrique peuvent s’appliquer aux actions du muscle cardiaque (le cœur étant une forme de sphère qui se rapproche et s’éloigne de son centre), leur utilisation pour le muscle squelettique est plus douteuse. Nous sommes bien loin de la logique tirée du Grecque s’appliquant si bien à ISOMÉTRIQUE. Si nous poursuivions dans cette logique, lorsqu’un muscle se raccourcit, le préfixe MIO devrait être employé ce qui nous donne MIOMÉTRIQUE. Et pourquoi pas poursuive pour l’allongement du muscle? Le préfixe qui s’applique est PLI (P-L-I-O et non P-L-Y-O) ce qui nous donne PLIOMÉTRIQUE. Oui mais, la plyométrie dans tout ça (les entraînements qui font boing boing !)? En réalité, la plyométrie n’est pas une action musculaire, mais plutôt un enchaînement d’actions musculaire. On parle alors d’une séquence d’action nommée cycle étirement-raccourcissement (de l’anglais:stretch-shortening cycle).

Mais, quelle importance? Fondamentale…

L’utilisation d’une terminologie inappropriée pour décrire la base même de l’entraînement (l’action musculaire) dénote une lacune importante dans le souci du détail et dans le désir de présenter une information claire, significative et uniforme à la population. Non, vous ne soulèverez pas plus lourd parce que vous utilisez les termes MIOMÉTRIQUE, ISOMÉTRIQUE ouPLIOMÉTRIQUE. Par contre, cette forme de négligence et ce manque d’homogénéité entraînent une série de complications qui peuvent effectivement nuire à votre entraînement. Ne vous est-il pas arrivé de ne pas être en mesure de déchiffrer le nom de l’exercice qui vous a été prescrit? Le fameux Zottman curl, ça se fait comment? Ou bien le trop peu célèbre Indiana Pull? Même entre entraîneurs, le manque de consensus sème la confusion et mine affreusement la crédibilité.

Il est donc important de mettre un peu d’ordre dans le lexique des entraîneurs et d’évincer certains termes dignes de perronismes. Commençons donc par nommer adéquatement les actions musculaires : lorsque le muscle se raccourci : MIOMÉTRIQUE, lorsqu’il s’allonge : PLIOMÉTRIQUE, lorsque ses extrémités sont fixes : ISOMÉTRIQUE et lorsque l’on fait des entraînements boing boing : Cycle étirement-raccourcissement. Finalement, pour ceux et celles qui croient que je pousse la note trop loin, sachez qu’il existe une publication scientifique[1] qui explore en profondeur ce que j’ai à peine abordé. Certains doivent avoir plus de temps libres que moi…

Je vous l’ai dit, un petit billet…

 Référence

1.   Faulkner, JA. Terminology for contractions of muscles during shortening, while isometric, and during lengthening. J Appl Physiol 2003; 95(2). 455-9.